Par Me Jean-Marc Noyer, avocat au Barreau de Paris (Cabinet Noyer)
La loi, l’assurance et le foncier : ménage à trois déplafonné
Cass. civ 3e, 23 janvier 2025, RG 23-14.887
La création, au cours du bail expiré, d’une nouvelle obligation légale est un élément à prendre en considération pour la fixation du loyer de renouvellement d’un bail commercial. Tel est le cas de l’obligation (datant de 2014) du bailleur copropriétaire non-occupant de s’assurer contre les risques de responsabilité civile. Il a ainsi été considéré que l’augmentation, tant du coût de l’assurance propriétaire non-occupant (Pno) que de la taxe foncière, deux dépenses à la charge du bailleur dans cette affaire, a entraîné, outre une perte notoire de rendement locatif, une modification notable des obligations des parties au cours du bail expiré… Et justifiait donc le déplafonnement. Attention toutefois aux raccourcis : une nouvelle obligation légale n’entraîne pas de facto le déplafonnement, cela signifie seulement qu’elle peut – éventuellement – le faire, entraînant une modification des obligations des partie et donc permettre la fixation du loyer à la valeur locative statutaire !
Les clés ou l’indemnité
Cass. Civ. 3e, 14 novembre 2024, RG 23-16.539
La chose louée n’est pour de bon libérée que si le locataire prouve avoir remis les clés. Peu importe que le preneur n’exploite plus son activité au sein des locaux – et ce même si cette cessation résulte d’un manquement du bailleur à son obligation de délivrance : il restera tenu de payer une indemnité d’occupation s’il ne justifie pas avoir remis les clés ! «Départ» des locaux n’est pas synonyme de «restitution» de la chose louée.
Oubli d’immatriculation : le rédacteur paie l’addition
Cass. Civ. 3e, 26 septembre 2024, RG 23.14.786
Un défaut d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (encore un est-on tenté de dire !) peut entraîner une dénégation du statut des baux commerciaux et donc imposer au locataire de quitter les lieux sans indemnité d’éviction. Dans un arrêt rendu le 26 septembre 2024 par la Cour de cassation, le preneur évincé a toutefois tenté de se retourner contre le rédacteur de l’acte de cession ayant omis d’effectuer cette formalité. La responsabilité de ce dernier peut être engagée si le cessionnaire démontre avoir perdu son droit au bail sur les locaux – ce qui est bien là le plus ennuyeux…
Ne pas confondre bail et convention d’occupation
Cour administrative d’appel Lyon, 4e chambre – formation à 3, 16 janvier 2025, n° 23LY02298
Un locataire est autorisé à exploiter un bar-restaurant sur la plage du Lido appartenant au domaine public. La Mairie ouvre toutefois un appel à candidatures pour la vente du «droit au bail». La délibération du conseil municipal écarte le preneur, celui-ci conteste. Or, le contrat conclu était une convention d’occupation précaire et non un bail commercial. Le preneur n’avait de toutes façons droit à aucun renouvellement et ne pouvait utilement faire obstacle à la conclusion du bail autorisé par la délibération. Convention d’occupation précaire sur le domaine public et bail commercial ne doivent pas être confondus !
