Cour de cassation Troisième chambre civile 25 avril 2024 Pourvoi N° 23-10.384 Calend’Auto Sarl c./Sci Des Esserts Faits et procédure
Selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 8 novembre 2022), le 10 juillet 2009, la société civile immobilière Des Esserts (la bailleresse) a donné à bail commercial à Mme U, aux droits de laquelle est venue la société Calend’Auto (la locataire), un terrain destiné au négoce de véhicule neufs et d’occasion.
Au motif de l’exercice sur le terrain loué d’activités de nettoyage et de réparation de véhicules, la bailleresse a, le 26 juin 2017, délivré à la locataire un commandement, visant la clause résolutoire insérée au bail, de respecter la destination des lieux.
Le 26 juillet 2017, la locataire a assigné la bailleresse en annulation du commandement.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen La locataire fait grief à l’arrêt de constater la résiliation de plein droit du bail commercial, de la déclarer occupante sans droit ni titre, de la condamner à libérer le terrain occupé et à régler une indemnité d’occupation, alors «que le bailleur ne peut mettre en œuvre la clause résolutoire figurant au bail de mauvaise foi ; que, dans ses écritures d’appel, la société Calend’Auto faisait valoir que la société Des Esserts avait attendu la dernière année du bail commercial pour se prévaloir de la clause résolutoire, ce qui démontrait que la mise en œuvre de cette clause avait pour objet de lui permettre de ne pas verser d’indemnité d’éviction ; qu’elle ajoutait que le fils du gérant de la société bailleresse, également associé de celle-ci, était le gérant de la société de nettoyage voisine de la société Calend’Auto, de sorte que la société Des Esserts avait nécessairement connaissance depuis plusieurs années des activités exercées par la société Calend’Auto, qu’elle avait tolérées ; qu’il en résulte que la société Calend’Auto avait invoqué la mauvaise foi de la société bailleresse en ce qu’elle avait toléré pendant toute la durée du bail les activités exercées par la société preneuse pour mettre en œuvre, à l’approche du terme, la clause résolutoire et éviter de payer l’indemnité d’éviction ; qu’en jugeant que c’était à bon droit que la société Des Esserts s’était prévalue de la résiliation de plein droit du bail commercial, parce que la société Calend’Auto avait continué à se livrer à des activités autres que de négoce de véhicules, activités interdites par le bail, après le délai d’un mois rappelé par le commandement, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Des Esserts n’avait pas mis en œuvre de mauvaise foi la clause résolutoire stipulée au bail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.» Réponse de la Cour Vu l’article 1134, alinéa 3, du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : Selon ce texte, les conventions doivent être exécutées de bonne foi.
Pour accueillir les demandes de la bailleresse, l’arrêt retient que la locataire avait continué à se livrer à des activités autres que le négoce de véhicules, seul autorisé par le bail, après le délai d’un mois rappelé par le commandement visant la clause résolutoire.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la clause résolutoire avait été mise en œuvre de bonne foi par la bailleresse, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’autre grief, la Cour : – Casse et annule, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 8 novembre 2022, entre les parties, par la cour d’appel de Chambéry ; – Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Chambéry, autrement composée ; – Condamne la société civile immobilière Des Esserts aux dépens ; – En application de l’article 700 du Code de procédure civile, condamne la société civile immobilière Des Esserts à payer à la société Calend’Auto la somme de 3.000 euros ; – Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ; (…)


