Tribunal judiciaire de Bobigny
Chambre 5, section 1
Jugement contentieux du 25 août 2020
RG 16/05482
Adeleco c./Imfra Sas, Rosny Beauséjour Sci, Uni-Commerces Sas
Exposé du litige
Les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces sont copropriétaires au sein du centre commercial Rosny 2 situé dans la commune de Rosny-sous-Bois (93).
Lors de l’assemblée générale des copropriétaires du 27 septembre 2013, ces sociétés ont décidé avec d’autres copropriétaires d’engager d’importants travaux de rénovation du centre commercial, dont elles ont répercuté une partie du coût sur leurs locataires, suscitant l’opposition de certains d’entre-eux.
Par acte du 11 mai 2016, L’Association de défense d’enseignes locataires d’ensembles commerciaux (ci-après dénommée “Adeleco”), agissant en qualité de mandataire des sociétés Chaussures Eram, Naf Naf, Magellan, Camaïeu International, Nature & Découvertes, Damart-Serviposte, Delta Lingerie, Devred, Cafan, Caroll International, Elexia (exploitant sous l’enseigne Franck Provost), La Poste, Ronip, San Marina, Ludendo Commerce France, Boulangeries Paul, El rancho France et France Quick Sas a fait assigner les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces devant le tribunal de grande instance de Bobigny afin d’obtenir leur condamnation à lui rembourser le coût des travaux votés lors de l’assemblée générale du 27 septembre 2013 mis à la charge de ses mandants.
Les sociétés preneuses suivantes sont intervenues volontairement à l’instance par l’intermédiaire de leur mandataire l’Adeleco :
– Du Pareil au Même, Micromania, Etam Lingerie, Maison 123, Flunch par conclusions du 17 octobre 2016 ;
– Heyraud, Texto France, Etam Prêt-à-Porter, Ex And Holding (précédemment dénommée André), Elexia (enseigne Jean Louis David), Minelli, Nation Chaussures par conclusions du 9 mai 2017 ;
– Undiz par conclusions du 31 juillet 2019.
Le 25 août 2016, les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces ont fait assigner l’Adeleco devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de voir prononcer la nullité du contrat d’association l’instituant pour illicéité de son objet. Compte tenu de l’engagement de cette procédure, le juge de la mise en état de ce tribunal, statuant à la demande des sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces par ordonnance du 7 décembre 2016 rectifiée par ordonnance du 12 juillet 2017, a prononcé un sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal de grande instance de Nanterre.
Par jugement du 4 mai 2017, le tribunal de grande instance de Nanterre a dit licite l’objet social de l’association Adeleco et a en conséquence débouté les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces de l’ensemble de leurs demandes.
Les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces ayant relevé appel de ce jugement, le juge de la mise en état de ce tribunal a prononcé un nouveau sursis à statuer dans l’attente de la décision de la cour d’appel, par ordonnance du 30 août 2017.
Par arrêt du 5 octobre 2018, la cour d’appel de Versailles a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en toutes ses dispositions. Les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces ont formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt. Cette procédure est actuellement pendante devant la Cour de cassation.
Dans le cadre d’un nouvel incident soulevé par les sociétés bailleresses, le juge de la mise en état, statuant par une ordonnance du 15 mai 2019, a :
– dit les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces irrecevables en leur demande d’annulation de l’assignation du 11 mai 2016 et des conclusions subséquentes fondée sur la nullité des mandats ad agendum pour cause de défaut de pouvoir de leur signataire agissant pour le compte des sociétés locataires,
– dit recevables les sociétés bailleresses en leur demande d’annulation de l’assignation du 11 mai 2016 et des conclusions subséquentes fondée sur la violation alléguée de l’article 66-4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et des dispositions des articles L. 623-1 et suivants du Code de la consommation,
– débouté les sociétés bailleresses de cette demande ainsi que de leur demande au titre des frais irrépétibles,
– débouté l’association Adeleco de ses demandes reconventionnelles.
Par acte du 23 septembre 2019, la société Rosny Beauséjour a fait assigner la société Etam Lingerie en intervention forcée aux fins de condamnation au paiement des charges dues selon elle au titre des travaux de rénovation réalisés dans le centre commercial Rosny 2. Elle demande à cet égard, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de :
– la déclarer recevable et bien fondée en sa demande d’intervention forcée et ordonner la jonction des 2 instances ;
– condamner la société Etam Lingerie à lui verser la somme de 20.465,55 €, augmentée de la somme de 2.046,55 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 14 janvier 2017, et la somme de 37.855,30 € TTC, augmentée de la somme de 3.785,53 € au titre de la pénalité de 10% et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 8 octobre 2016 ;
– ordonner la capitalisation des intérêts ;
– condamner la société Etam Lingerie aux dépens avec distraction et à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par acte du même jour, la société Imfra a également fait assigner en intervention forcée aux mêmes fins les sociétés Etam Lingerie, Maison 123 et Undiz. Elle demande ainsi au tribunal, sous le bénéfice de l’exécution provisoire de :
– la déclarer recevable et bien fondée en sa demande d’intervention forcée et ordonner la jonction des 2 instances ;
– condamner la société Etam Lingerie à lui verser la somme de 52.155,23 €, augmentée de la somme de 5.215,52 € au titre de la pénalité de 10% et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 8 octobre 2016, et la somme de 29.091,29 €, augmentée de la somme de 2.909,13 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 5 mai 2017 ;
– condamner la société Maison 123, à lui verser la somme de 50.991 €, augmentée de la somme de 5.099,10 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 15 octobre 2016 ;
– condamner la société Undiz, à lui verser la somme de 34.177,33 €, augmentée de la somme de 3.417,73 € au titre de la pénalité de 10% et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 16 octobre 2016 ;
– ordonner la capitalisation des intérêts ;
– condamner in solidum la société Etam Lingerie, la société Maison 123 et la société Undiz aux entiers dépens avec distraction ainsi qu’au paiement à son profit de la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Ces instances ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 6 novembre 2019. La clôture de la procédure a été ordonnée le 11 décembre 2019.
Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 15 octobre 2019, l’Adeleco agissant en qualité de mandataire des sociétés visées supra sollicite au visa des articles 1134, 1162, 1163 et 1315 anciens du Code civil et des articles 1110 et 1174 nouveaux du Code civil et sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– de dire et juger parfait le désistement d’instance et d’action des sociétés Delta Lingerie, Ludendo, Pimkie, Du Pareil au Même, Camaïeu, Old Wild West Sas, Quick et Ronip,
– de dire et juger les sociétés demanderesses et intervenantes recevables et bien fondées en leurs demandes,
– de dire et juger non écrite la clause de renonciation du bail de la société Nature & Découvertes,
– de dire et juger les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces mal fondées en leurs fins de non recevoir et les débouter,
– de dire irrecevables les assignations en intervention forcée délivrées par les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces aux société Etam Lingerie, Maison 123 et Undiz,
– de condamner la société Imfra à lui payer la somme de 387.505,01 € TTC en qualité de mandataire ad agendum des sociétés suivantes :
– Ex and Holdind 91.358,89 € TTC
– Chaussures Eram 75.778,30 € TTC
– Heyraud 45.325,33 € TTC
– Naf Naf 60.197,61 € TTC
– Magellan (enseigne Bonobo) 45.089,29 € TTC
– Texto 37.535,06 € TTC
– Nature & Découvertes 13.692,00 € TTC
– Etam Lingerie 5.795,03 € TTC
– Undiz 3.797,78 € TTC
– Maison 123 5.665,67 € TTC
– Etam Lingerie, venant aux droits de Etam Prêt-à-Porter 3.270,05 € TTC
_______________
387.705,01 € TTC
– de débouter la société Imfra de ses demandes formées à l’encontre de la société Etam Lingerie, la société Maison 123, la société Undiz et la société Etam Lingerie, venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter,
– de condamner la société Rosny Beauséjour à lui payer la somme de 680.744,76 € TTC en qualité de mandataire ad agendum des sociétés suivantes :
– Damart 93.147,16 € TTC
– Devred 38.092,53 € TTC
– Cafan 54.170,53 € TTC
– Caroll 47.491,95 € TTC
– Elexia (enseigne Franck Provost) 41.308,09 € TTC
– Elexia (enseigne Jean Louis David) 31.908,62 € TTC
– La Poste 23.671,27 € TTC
– Minelli 76.432,35 € TTC
– Nation Chaussures 23.498,62 € TTC
– San Marina 46.502,53 € TTC
– Micromania 46.007,86 € TTC
– Nature & Découvertes 60.107,00 € TTC
– Boulangeries Paul 91.826,64 € TTC
– Etam Lingere 2.373,47 € TTC
– Etam Lingerie, venant aux droits de Etam Prêt-à-Porter 4.206,14 € TTC
______________
680.744,76 € TTC
– de débouter la société Rosny Beauséjour de sa demande en paiement formée à l’encontre de la société Etam Lingerie,
– de condamner la société Uni-Commerces à lui payer la somme de 362.587,91 € TTC en qualité de mandataire ad agendum la société Flunch,
– condamner la société Imfra à lui payer une somme de 110.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– de condamner la société Rosny Beauséjour à lui payer une somme de 150.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– de condamner la société Uni-Commerces à lui payer une somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– de condamner la société Imfra à payer à la société Etam Lingerie une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, au titre de l’assignation en intervention forcée,
– de condamner la société Rosny Beauséjour à payer à la société Maison 123 une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, au titre de l’assignation en intervention forcée,
– de condamner la société Rosny Beauséjour à payer à la société Undiz une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, au titre de l’assignation en intervention forcée,
– de débouter les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
– de les condamner solidairement aux entiers dépens et autoriser Maître Jehan-Denis Barbier à les recouvrer directement conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 24 octobre 2019, les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces sollicitent au visa des articles 32 et 122 du Code de procédure civile, 1134 et 1154 du Code civil dans leur version applicable à la cause et sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de :
A titre principal :
– déclarer l’Adeleco irrecevable en ses demandes,
A titre subsidiaire :
– débouter l’Adeleco de ses demandes,
A titre reconventionnel :
– condamner l’Adeleco, en qualité de mandataire de la société Maison 123, à verser à la société Imfra la somme de 50.991 €, augmentée de la somme de 5.099,10 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 15 octobre 2016 ;
– condamner l’Adeleco, en qualité de mandataire de la société Etam Lingerie, à verser à la société Imfra la somme de 52.155,23 €, augmentée de la somme de 5.215,52 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 8 octobre 2016 ;
– condamner l’Adeleco, en qualité de mandataire de la société Etam Lingerie, venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter, à verser à la société Imfra la somme de 29.091,29 €, augmentée de la somme de 2.909,13 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 5 mai 2017 ;
– condamner l’Adeleco, en qualité de mandataire de la société Undiz, à verser à la société Imfra la somme de 34.177,33 €, augmentée de la somme de 3.417,73 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 16 octobre 2016 ;
– condamner l’Adeleco, en qualité de mandataire de la société Etam Lingerie, à verser à la société Rosny Beauséjour la somme de 20.465,55 €, augmentée de la somme de 2.046,55 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 14 janvier 2017 ;
– condamner l’Adeleco, en qualité de mandataire de la société Etam Lingerie, venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter, à verser à la société Rosny Beauséjour la somme de 37.855,30 € TTC, augmentée de la somme de 3.785,53 € au titre de la pénalité de 10 % et des intérêts de retard au taux contractuel à compter du 8 octobre 2016 ;
– ordonner la capitalisation des intérêts ;
En toute hypothèse :
– condamner Adeleco, en sa qualité de mandataire ad agendum, à verser, outre les entiers dépens avec distraction la somme de 50.000 € par société bailleresse au titre des frais irrépétibles.
Conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, il sera intégralement renvoyé aux conclusions récapitulatives et assignations en intervention forcée des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Le juge de la mise en état a proposé aux parties de désigner un médiateur judiciaire en application de l’article 131-1 du Code de procédure civile. Cette proposition n’a toutefois pas été suivie d’effet, faute d’accord unanime des parties.
L’audience à laquelle l’affaire devait être plaidée n’ayant pu se tenir en raison de la période de crise sanitaire et de la restriction de l’activité civile, le président a décidé de recourir à la procédure sans audience conformément à l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 23 mars 2020. Compte tenu de l’absence d’opposition des parties au recours à cette procédure, le délibéré a été fixé au 25 août 2020.
Motifs de la décision
Sur les interventions volontaires
Les sociétés Du Pareil au Même, Micromania, Etam Lingerie, Maison 123, Flunch, Heyraud, Texto France, Etam Prêt-à-Porter, Ex and Holding (précédemment dénommée André), Elexia (enseigne Jean Louis David), Minelli, Nation Chaussures, Undiz, représentées par leur mandataire l’Adeleco, demandent à être reçues en leur intervention volontaire.
Les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces ne formulent aucune observation à cet égard.
Les sociétés susvisées seront donc reçues en leur intervention volontaire.
Sur les désistements d’instance et d’action
Les sociétés Delta Lingerie, Ludendo, Pimkie, Du Pareil au Même, Camaïeu, Old Wild West Sas, Quick et Ronip, représentées par leur mandataire l’Adeleco, demandent au tribunal de dire parfait leur désistement d’instance et d’action.
Les sociétés bailleresses ne formulent aucune demande, défense au fond ou fin de non recevoir à l’encontre des sociétés précitées. Il convient donc de dire parfait le désistement de ces dernières.
Sur la recevabilité des interventions forcées
L’Adeleco conteste la recevabilité de la mise en cause, par voie d’intervention forcée, des sociétés Etam Lingerie, Maison 123 et Undiz. Elle soutient en substance :
– que les sociétés assignées n’ont pas la qualité de tiers mais de parties à l’instance en tant que mandantes de l’Adeleco,
– que les bailleresses n’ont aucun intérêt à rendre commun le jugement aux locataires qu’elles ont assignés en intervention alors qu’ils sont déjà dans la procédure par l’intermédiaire de leur mandataire commun.
Les sociétés Imfra et Rosny Beauséjour s’opposent à cette fin de non-recevoir. Elles font valoir :
– que l’Adeleco n’a pas qualité pour représenter les sociétés Etam Lingerie, Maison 123 et Undiz ; que les sociétés bailleresses ne peuvent attendre l’issue de la procédure pendante devant la Cour de cassation sur ce point avant d’engager une éventuelle action à l’encontre des sociétés susvisées pour recouvrer les sommes dues par ces dernières; qu’en effet, l’annulation éventuelle de l’acte constitutif de l’Adeleco rendrait impossible l’exécution de la décision à venir du tribunal, qui ne serait rendue qu’à l’encontre de cette association ;
– que le mandat de l’Adeleco ne lui donne pas pouvoir de représenter les sociétés précitées dans le cadre de demandes reconventionnelles.
L’article 122 du Code de procédure civile dispose que constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L’article 331 du même code dispose quant à lui qu’un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d’agir contre lui à titre principal. Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement. Le tiers doit être appelé en temps utile pour faire valoir sa défense.
Enfin l’article 1984 du Code civil dispose que le mandat est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.
En l’espèce il résulte de l’assignation et des conclusions d’intervention volontaire susvisées que les sociétés Etam Lingerie, Maison 123 et Undiz ne sont pas des tiers à la présente procédure mais bien des parties à l’instance agissant par l’intermédiaire de leur mandataire commun, l’Adeleco, association qu’il convient de considérer, à ce jour, comme ayant été valablement constituée au vu de la décision rendue par la cour d’appel de Versailles le 5 octobre 2018.
En conséquence, la mise en cause des sociétés précitées par voie d’assignation en intervention forcée sera déclarée irrecevable.
Sur la recevabilité des demandes de l’Adeleco pour le compte de ses mandantes
1. Sur la fin de non-recevoir tirée du non-respect de la clause de médiation stipulée dans les contrats de bail
Les sociétés bailleresses soulèvent l’irrecevabilité de la demande formée par l’Adeleco pour le compte des sociétés Naf Naf, Maison 123, Devred, Caroll, Elexia (Franck Provost), La Poste, Damart, Chaussures Eram, Etam Lingerie, Micromania et Undiz. Elles expliquent :
– que les sociétés précitées n’ont pas respecté la clause de médiation stipulée dans les baux, qui impose aux parties une tentative de médiation avant toute action en justice ;
– que les mises en demeure adressées par les sociétés preneuses, seulement quelques jours avant d’engager la procédure judiciaire, n’avaient que pour seul but d’éluder la médiation, de sorte qu’elles sont sans effet.
L’Adeleco réplique :
– que préalablement à l’engagement de la présente instance, les sociétés Damart, Devred, Caroll International, Elexia (Franck Provost), La Poste, Ronip, Etam Lingerie, Eram, Naf Naf, Maison 123 et Undiz avaient fait signifier à leur bailleur, par exploit d’huissier, une mise en demeure de leur rembourser les charges qu’elles estimaient indues, de sorte que la clause de médiation n’était plus applicable, conformément aux stipulations des baux ;
– que pour les sociétés Ex and Holding, Elexia, Minelli, Nation chaussures, Promotion du Prêt-à-Porter, la procédure de médiation a été régulièrement suivie, ainsi que cela ressort de l’ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de Bobigny le 6 février 2017.
L’article 122 du Code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. L’article 32 du même code dispose qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.
L’article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
En l’espèce, il convient en premier lieu de relever que les bailleurs ne soulèvent pas d’irrecevabilité pour cause de non-respect de la clause de médiation en ce qui concerne les sociétés André, Elexia (exploitant sous l’enseigne Jean Louis David), Minelli, Nation Chaussures et Promotion du Prêt-à-Porter. Les développements de l’Adeleco relatifs au respect par ces sociétés de la clause de médiation stipulée dans les contrats de bail sont donc sans objet.
Cela étant précisé, l’article 26.3 des stipulations générales des baux conclus avec les sociétés visées par les bailleurs stipule ce qui suit : «26.3.1 Principe : (…) les Parties entendent recourir, préalablement à toute instance judiciaire, à la médiation pour toutes les contestations qui viendraient à se produire à propos de la validité, l’interprétation et l’exécution ou l’inexécution, l’interruption ou la réalisation du présent contrat de bail et ce, dans les conditions décrites ci-après (…).
26.3.2 Conditions :
1. La Partie qui entendra faire application de la présente clause en avertira l’autre par lettre recommandée avec accusé de réception en visant, expressément, le présent article et en proposant une liste de trois personnes maximum susceptibles d’être retenues comme médiateurs (…).
3. La médiation conservera un caractère confidentiel entre les Parties qu’un accord ou non soit intervenu entre elles et ne pourra plus être mise en œuvre si un simple exploit d’huissier a, déjà, été notifié à propos du différend en question.»
Il est constant que l’Adeleco a fait signifier aux bailleurs une mise en demeure de rembourser les charges que les locataires estimaient avoir indûment payées, par exploits d’huissier des 4 mai 2016 (pour les sociétés Damart, Devred, Caroll International, Elexia Franck Provost, La Poste, Chaussures eram et Naf Naf), 7 octobre 2016 (pour les sociétés Etam Lingerie et Maison 123) et 11 avril 2017 (pour la société Etam prêt-à-Porter, aux droits de laquelle est venue la société Etam Lingerie). Ainsi, conformément aux stipulations précitées, la mesure de médiation ne pouvait plus être mise en œuvre lorsque ces sociétés ont engagé la présente procédure par l’intermédiaire de leur mandataire commun.
Par ailleurs, il ne peut être fait grief à l’Adelaco d’avoir fait preuve de mauvaise foi en faisant signifier ces actes quelques jours seulement avant d’engager la présente procédure. En effet, les stipulations contractuelles précitées ne prévoient aucun délai minimum entre la délivrance de l’exploit d’huissier et la saisine d’une juridiction.
En conséquence, la fin de non-recevoir soulevée par les défenderesses sera rejetée.
2. Sur la fin de non-recevoir tirée d’une renonciation à agir de certains locataires
Les sociétés bailleresses soulèvent l’irrecevabilité des demandes formées pour le compte des sociétés Boulangeries Paul, Nation chaussures, Ex and Holding (venant aux droits de la société André), Nature & Découvertes, Minelli et Micromania, au motif que ces dernières auraient contractuellement renoncé à agir à leur encontre au titre des charges résultant des travaux de rénovation du centre commercial.
L’Adeleco s’oppose à cette fin de non-recevoir et sollicite au surplus de déclarer non écrite la clause de renonciation figurant dans le contrat conclu avec la société Nature & Découvertes.
Les articles 2044 et suivants du Code civil, dans leur rédaction en vigueur au moment de la signature des protocoles litigieux, soit antérieurement à la réforme du 18 novembre 2016, disposent que la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu. Les transactions ne règlent que les différends qui s’y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l’on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé. Il est constant que la validité d’une transaction repose sur l’existence de concessions réciproques soumises à l’appréciation souveraine des juges du fond.
L’article 1134 ancien du même code dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. (…). Elles doivent être exécutées de bonne foi.
L’article 1135 ancien du même code dispose que les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature.
Sur la recevabilité de la demande formée pour le compte de la société Boulangeries Paul
A l’appui de sa fin de non-recevoir, la société Rosny Beauséjour soutient :
– qu’aux termes de protocoles qu’elle a conclus avec la société Boulangeries Paul le 2 décembre 2015, cette dernière a renoncé à agir contre le bailleur au titre des charges résultant des travaux de rénovation qui lui ont été facturées ;
– que ces protocoles comportent bien des concessions réciproques ; que la renonciation à agir consentie par le locataire ne porte pas atteinte à son droit d’agir en justice; que les dispositions de la loi dite “Pinel” du 18 juin 2014 invoquées par l’Adeleco ne s’appliquent pas aux baux résiliés car ceux-ci ont été conclus antérieurement à l’entrée en vigueur de cette loi.
L’Adeleco, mandataire de la société Boulangeries Paul, lui oppose :
– que les protocoles transactionnels que la société Boulangeries Paul a conclus ne portaient que sur la résiliation des baux avec transfert d’activité et la signature de nouveaux baux; que les travaux litigieux ne faisaient nullement l’objet de la transaction ;
– que la société Boulangeries Paul n’a pas pu renoncer à sa créance de trop-versé de charges sans aucune contrepartie ;
– qu’en outre, la clause invoquée par le bailleur est contraire à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, en ce qu’elle porte une atteinte excessive au droit d’agir en justice, sans aucun motif légitime ni aucune contrepartie ;
– qu’une clause générale de renonciation à contester «les loyers et les charges» est de surcroît contraire à l’ordre public, puisque, d’une part, les révisions légales sont d’ordre public et que, d’autre part, depuis la loi dite “Pinel” du 18 juin 2014, les dispositions relatives aux charges sont également d’ordre public.
Le 2 décembre 2015, la société Boulangeries Paul et la société Rosny Beauséjour ont conclu deux protocoles transactionnels portant résiliation du bail du 25 mai 2004 et du 22 juin 2006, aux termes desquels il a notamment été convenu ce qui suit : «Article 1 – Concessions réciproques des parties
1-1 le bailleur, en contrepartie des concessions du preneur stipulées à l’article 1.2 du protocole,
accepte de :
– mettre un terme à la procédure de refus de renouvellement, telle qu’il l’a initiée le 26 mars 2014
– transférer l’activité du preneur dans le nouveau local et de lui consentir ainsi un nouveau bail 1-2 de son côté, en contrepartie des concession du bailleur stipulées à l’article 1.1 du protocole,
accepte :
– fixer la date de résiliation du bail à la date visée à l’article 2 du protocole
– libérer le local à la date visée à l’article 3.1 du protocole et dans les conditions prévues au présent protocole
A l’article 4 du même protocole, il est précisé que «le preneur s’engage à régler au bailleur toutes les sommes dues au titre du bail, selon décompte qui sera arrêté à la date de résiliation, en ce inclus les provisions et liquidations de charges, impôts ou taxes restant à émettre à cette date.»
A l’article 5.2 : «la présente résiliation est consentie sans indemnité pour le preneur dans la mesure où son activité est transférée dans le nouveau local et ce de plus sans rupture d’exploitation et en contrepartie d’une participation financière du bailleur aux travaux d’aménagement du nouveau local. Le preneur se déclare ainsi pleinement satisfait de la présente transaction».
5.3 : il est précisé que le bailleur consent au protocole compte tenu de la confirmation expresse par le preneur de l’absence de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail, notamment au titre des loyers et charges calculés et facturés par le bailleur.
En conséquence le preneur conforme renoncer à tout recours ou action résultant du bail à l’encontre du bailleur et de la société gestionnaire du centre la société espace expansion. En contrepartie et sous réserve de la parfaite exécution des présentes, le bailleur déclare également renoncer à toute action et instance à l’encontre du preneur au titre des relations contractuelles résultant du bail jusqu’à ce jour, et ce à l’exception du règlement de la quote-part due par le preneur au titre des travaux de rénovation réalisés dans le centre.»
Le même jour, les parties ont conclu un protocole de résiliation partielle valant avenant au bail du 30 octobre 2007 portant sur le local de 329 m2, aux termes duquel il a été convenu ce qui suit :
A l’article 1.2 : «il est précisé que le bailleur consent au protocole compte tenu de la confirmation expresse par le preneur de l’absence de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail, notamment au titre des loyers et des charges calculés et facturés par le bailleur. En conséquence, le preneur confirme renoncer à tout recours ou action résultant du bail à l’encontre du bailleur et de la société gestionnaire du centre, la société Espace Expansion.». En contrepartie et sous réserve de la parfaite exécution des présentes, le bailleur déclare également renoncer à toute action et instance à l’encontre du preneur au titre des relations contractuelles résultant du bail jusqu’à ce jour, et ce à l’exception du règlement de la quote-part du par le preneur au titre des travaux de rénovation réalisé dans le centre.
A l’article 4: «le protocole vaut transaction entre les parties.»
A l’article 3: «en contrepartie de la résiliation partielle du bail, le bailleur s’engage à verser au preneur qui l’accepte, une indemnité de résiliation forfaitaire et transactionnelle d’un montant de 200 000 € HT. Au moyen de cette indemnité, le preneur se reconnaît entièrement dédommagé de tous les coût induits par la présente résiliation et renonce à faire état de tous préjudices et à poursuivre le bailleur à quelque titre que ce soit.»
Il convient de souligner que l’Adeleco, qui s’oppose à la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés bailleresses en raison de l’illicéité alléguée des stipulations précitées, ne formule pour autant aucune demande expresse d’annulation de ces clauses et des accords qui les contiennent. En effet, force est de constater que le dispositif de ses écritures ne comporte aucune semblable demande. Ainsi, l’Adeleco ne tire aucune conclusion juridique des moyens qu’elle développe au sujet de l’illicéité des transactions conclues avec les preneurs qu’elle représente.
Par voie de conséquence, il n’y a pas lieu, pour le tribunal, d’écarter l’application des stipulations précitées, qui s’imposent tant que leur nullité n’a pas été prononcée, mais de déterminer si l’accord des parties comporte, ou non, une renonciation des preneurs à agir à l’encontre des bailleurs au titre des charges résultant des travaux de rénovation du centre commercial.
Cette observation liminaire vaut pour l’ensemble des sociétés Boulangeries Paul, Nations Chaussures, Ex and Holdind, Nature & Découvertes, Minelli et Micromania, au sujet desquelles les bailleurs soulèvent la même fin de non-recevoir tirée de l’existence d’une clause contractuelle de renonciation à agir.
S’agissant de la société Boulangeries Paul, les protocoles précités stipulent une renonciation du preneur et du bailleur à tout recours ou action entre eux au titre des baux résiliés en ce qui concerne notamment les loyers et charges. Ces stipulations portent sur les conséquences de la résiliation des baux et participent d’un accord global destiné à vider toute contestation née ou à naître au sujet de ces baux, en ce inclus la question des loyers et des charges.
Par ailleurs, il est notable qu’à la date de la signature des protocoles, le 2 décembre 2015, le preneur était déjà pleinement informé par le bailleur, depuis l’envoi de deux courriers adressés par lettre recommandée avec accusé de réception les 10 octobre et 27 novembre 2014, du coût des travaux de rénovation et des modalités de leur facturation au titre des charges. Il convient donc de considérer que les charges issues des travaux de rénovation objet du présent litige ont été intégrées dans le champ contractuel des protocoles de résiliation, de sorte qu’en concluant ces actes, le preneur a renoncé à contester la mise à sa charge desdits travaux.
Il convient donc de dire l’Adeleco, agissant en sa qualité de représentante de la société Boulangeries Paul, irrecevable à agir pour contester la refacturation des travaux de rénovation.
Sur la recevabilité de la demande formée pour le compte de la société Nation Chaussures
A l’appui de sa fin de non-recevoir, la société Rosny Beauséjour fait valoir :
– que cette société a renoncé à son droit de contester les charges refacturées à défaut pour elle d’avoir exercé son recours dans le délai d’un an prévu par le nouveau bail conclu le 28 septembre 2015 ;
– que la loi dite “Pinel” n’est pas applicable en l’espèce car la renonciation à agir porte sur des loyers et des charges dus en application d’un bail non soumis à cette nouvelle législation.
L’Adeleco lui oppose :
– que la clause alléguée par le bailleur comporte des erreurs manifestes et est incompréhensible ;
– que la stipulation faisant état d’une procédure en cours portant sur la refacturation des charges est erronée dans la mesure où aucune procédure n’était en cours au moment de la signature du contrat ;
– que la conclusion de l’acte de renouvellement de bail n’avait pas pour objet de transiger sur les charges du bail précédent ;
– que la prétendue transaction ne comporte aucune concession réciproque ; que la clause invoquée par la bailleresse est contraire à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ; qu’elle est de surcroît contraire à l’ordre public.
Par acte sous seing privé du 28 septembre 2015, les parties ont conclu un nouveau bail d’une durée de 10 ans à effet du 1er novembre 2015. Cet acte comporte notamment la stipulation suivante relative au “contexte dans lequel s’inscrit le présent bail” : «les parties sont convenues de renouveler amiablement le bail du 18 mai 2006 à compter du 1er novembre 2015 déclarant en conséquence renoncer expressément et irrévocablement aux effets du congé en date du 21 avril 2015 si bien que le bail du 12 mai 1999 est réputé s’être poursuivi par tacite prorogation jusqu’au présent bail de renouvellement étant précisé que les présentes constituent une transaction au sens des articles 2044 et suivants du Code civil qui emporte désistement d’action et d’instance et que chacune des parties conservant à sa charge les frais, dépens et honoraires par elles exposées dans le cadre de la procédure susvisée. Par ailleurs, il est précisé que le bailleur consent au présent bail de renouvellement compte tenu de la confirmation expresse par le Preneur de l’absence, à ce jour, de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail du 18 mai 2006, notamment au titre des loyers et des charges calculés et facturés par le bailleur.
En conséquence, le Preneur renonce à l’encontre du bailleur, de son mandataire et de l’organe à tous droits, demandes, actions et instances dont le bail du 18 mai 2006 notamment dans ses dispositions financières ou l’exercice par le preneur de son exploitation sur le centre, serait l’objet, la cause, l’accessoire ou l’occasion. A titre exceptionnel et en considération de la personnalité du preneur, ce dernier disposera d’un an à compter de la date de prise d’effet des présentes afin d’exercer ses droits dans la procédure en cours relative à la refacturation des charges. Etant ici précisé que les Parties soussignées conviennent, d’un commun accord, de donner à cette exception un caractère strictement confidentiel et de ne pas en faire état auprès des tiers, sauf le cas où la production du présent acte s’avérerait nécessaire pour la solution du litige.»
Pour les motifs exposés ci-dessus, il n’y a pas lieu, pour le tribunal, de se prononcer sur l’éventuelle illicéité de ces stipulations dont l’annulation n’est pas sollicitée par l’Adeleco.
Ces stipulations sont dépourvues de toute ambiguïté en ce qui concerne les conditions dans lesquelles le preneur est admis à soulever une éventuelle contestation des charges qui lui sont refacturées par le bailleur. Or, il est constant que la société Nation chaussures est intervenue volontairement dans la présente instance par conclusions du 9 mai 2017, soit après le 1er novembre 2016, terme du délai d’un an fixé par les stipulations précitées.
Il convient donc de dire l’Adeleco, agissant en sa qualité de représentante de la société Nation Chaussures, irrecevable à agir pour contester la refacturation des travaux de rénovation.
Sur la recevabilité de la demande formée pour le compte de la société Ex and Holding (précédemment dénommée André)
A l’appui de sa fin de non-recevoir, la société Imfra fait valoir :
– que les parties ont conclu le 17 juillet 2015 un protocole de résiliation de bail aux termes duquel le preneur a renoncé à contester les loyers et les charges ;
– que cette renonciation à agir ne porte pas atteinte au droit d’agir en justice; que le protocole comporte bien des concessions réciproques ; que les dispositions de la loi dite “Pinel” invoquées par l’Adeleco ne s’appliquent pas au bail résilié, qui a été conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de cette loi.
L’Adeleco lui oppose :
– que la question des charges est étrangère à l’objet de la transaction ;
– que la transaction suppose des concessions réciproques; que la société locataire n’a donc pas pu renoncer sans contrepartie à sa créance de trop-versé de charges ;
– que cette clause de renonciation est contraire à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’Homme; qu’elle est de surcroît contraire à l’ordre public.
Par acte sous seing privé du 17 juillet 2015, les parties ont conclu un protocole de résiliation partielle du bail conclu le 7 juin 2006 portant sur une surface de 120 m2 environ et ont renouvelé le bail sur la partie restante à compter du 1er janvier 2016.
Ce contrat stipule ce qui suit en son article 1er relatif aux concessions réciproques des parties : «1.1 le bailleur, en contrepartie des concessions du preneur stipulées à l’article 1.2 du protocole, accepte de mettre un terme partiellement au bail du 7 juin 2006 de manière anticipée.
1.2 De son côté, le preneur en contrepartie des concessions du bailleur stipulées à l’article 1.1 du protocole accepte :
– fixer la date partielle de résiliation du bail du 7 juin 2006 à la date visée à l’article 2 du protocole
– libérer la surface résiliée à la date visée à l’article 3.1 du protocole et dans les conditions prévues au présent protocole.»
Article 4 : «le preneur s’engage à régler au bailleur toutes les sommes dues au titre de la surface résiliée du bail du 7 juin 2006, selon décompte qui sera arrêté à la date de résiliation, en ce inclus les provisions et liquidations de charges, impôts ou taxes restant à émettre à cette date.»
Article 5 : «5.3 : il est précisé que le bailleur consent au protocole compte tenu de la confirmation expresse par le preneur de l’absence de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail, notamment au titre des loyers et charges calculés et facturés par le bailleur. En conséquence le preneur confirme renoncer à tout recours ou action résultant du bail à l’encontre du bailleur et de la société gestionnaire du centre la société espace expansion.»
A l’article 9 : «le protocole vaut transaction entre les parties».
Ainsi, le protocole comporte une renonciation du preneur à tout recours ou action à l’encontre bailleur au titre du bail résilié, au titre, notamment, des loyers et charges.
Pour les motifs exposés ci-dessus, il n’y a pas lieu, pour le tribunal, de se prononcer sur l’éventuelle illicéité de ces stipulations, dont l’annulation n’est pas sollicitée par l’Adeleco.
Il est notable qu’à la date de la signature du protocole, le 17 juillet 2015, le preneur était déjà pleinement informé par le bailleur, depuis l’envoi de deux courriers adressés par lettre recommandée avec accusé de réception les 10 octobre et 27 novembre 2014, du coût des travaux de rénovation et des modalités de facturation de ces travaux au titre des charges. Il convient donc de considérer que les charges issues des travaux de rénovation objet du présent litige ont été intégrées dans le champ contractuel du protocole de résiliation, de sorte qu’en concluant cet acte, le preneur a renoncé à contester la mise à sa charge desdits travaux.
Il convient donc de dire l’Adeleco, agissant en sa qualité de représentante de la société Ex and Holding, irrecevable à agir pour contester la refacturation des travaux de rénovation.
Sur la recevabilité de la demande formée pour le compte de la société Nature & Découvertes
A l’appui de leur fin de non-recevoir, les sociétés bailleresses font valoir :
– que par protocoles du 16 mai 2017, la société Nature & Découvertes a renoncé à agir à leur encontre au titre de la refacturation des travaux de rénovation ;
– que la société preneuse était informée de cette refacturation bien avant la conclusion de ces actes ;
– que les contrats conclus avec la société preneuse ne sont pas des contrats d’adhésion dans la mesure où ils contiennent 8 pages de conditions dérogatoires.
L’Adeleco s’oppose à cette fin de non-recevoir et demande que la clause de renonciation soit réputée non écrite en application des articles 1110 et 1171 du Code civil. A ce titre elle soutient :
– que les baux signés le 16 mai 2017 sont des contrats d’adhésion puisqu’ils comportent un ensemble de clauses non négociables ;
– que la clause de renonciation dont se prévalent les sociétés bailleresses crée un déséquilibre significatif entre les parties puisqu’elle ne comporte aucune contrepartie ;
– que la transaction ne porte pas sur les travaux litigieux ;
– que cette clause est de surcroît contraire à l’ordre public et à la Convention européenne des droits de l’homme.
L’article 1110 du Code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats litigieux, dispose que le contrat d’adhésion est celui dont les conditions générales, soustraites à la négociation, sont déterminées à l’avance par l’une des parties.
L’article 1171 du même code dispose que dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.
En l’espèce, il convient de déterminer si les contrats conclus entre les sociétés bailleresses et la société Nature & Découvertes sont des contrats d’adhésion et, dans cette hypothèse, si la clause de renonciation à agir qu’ils contiennent doit être réputée non écrite en application des dispositions précitées.
Par acte du 27 novembre 2006, la société Rosny Beauséjour a conclu avec la société Nature & Découvertes un bail commercial d’une durée de 10 ans. En outre, le 6 septembre 2010, la société Imfra a donné à bail civil à cette même société divers locaux pour une durée de 10 ans. Aux termes de deux actes sous seing privé datés du 16 mai 2017, les parties ont conclu un nouveau bail commercial ainsi qu’un nouveau bail civil.
Aux termes du point 5 du préambule des baux conclus le 16 mai 2017, intitulé “négociation et conclusion du bail”, il est stipulé ce qui suit : «Les parties ont discuté des modalités de renouvellement du bail du 6 septembre 2010 aux termes de divers échanges par mail et/ou par téléphone et/ou par rendez-vous. Lors d’un rendez-vous de négociation en date du 5 mai 2017, elles ont trouvé un accord sur les principales clauses et conditions du bail à conclure. Elles ont négocié les derniers éléments et finalisé le bail au terme d’emails du 11 mai 2017» (5 mai 2017 pour le bail commercial). «(…) Toutes les stipulations du bail ont été négociées de bonne foi au regard des obligations réciproques souscrites dans l’ensemble du bail. Les parties reconnaissent que toute clause du bail trouve sa contrepartie dans une autre clause du bail et qu’elle participe de son économie générale.»
Ainsi, il résulte des termes même des deux baux que l’accord que les parties ont conclu est le fruit de leur libre négociation. S’il est exact que ces contrats comprennent des clauses générales, qui sont identiques aux clauses de nombreux autres baux produits dans le cadre de la présente instance, notamment en ce qui concerne la liste des charges imputables au preneur, il n’en demeure pas moins que de nombreuses autres clauses sont particulières et ont été négociées entre le preneur et le bailleur, notamment celles relatives au montant du loyer, à la franchise de loyer, au dépôt de garantie, à la date du renouvellement et à la prise en charge des travaux d’aménagement du local loué. Il s’ensuit que les baux suvisés ne peuvent recevoir la qualification de “contrat d’adhésion”.
Par voie de conséquence, l’article 1171 du Code civil est inapplicable à la clause de renonciation litigieuse. L’Adeleco sera donc déboutée de sa demande aux fins de voir dire cette stipulation réputée non écrite.
Il convient désormais de déterminer si le paiement des charges au titre des travaux de rénovation du centre commercial est, ou non, compris dans les clauses de renonciation stipulées dans les baux, rappel étant fait que pour les motifs exposés ci-dessus, il n’y a pas lieu, pour le tribunal, de se prononcer sur l’éventuelle illicéité de ces stipulations, dont l’annulation n’est pas sollicitée par l’Adeleco.
Ces clauses, insérées dans la partie du préambule intitulé “contexte dans lequel s’inscrit le présent bail”, stipulent ce qui suit : «le bailleur consent au présent bail de renouvellement compte tenu de la confirmation expresse par le preneur de l’absence, à ce jour, de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail du 6 septembre 2010 (27 novembre 2006 pour le bail commercial) notamment au titre des loyers et des charges calculés et facturés par le bailleur.
En conséquence, le preneur renonce à l’encontre du bailleur, de son mandataire et de l’organe à tous droits, demandes et instances dont le bail du 6 septembre 2010 (27 novembre 2006 pour le bail commercial), notamment dans ses dispositions financières et/ou l’exercice par le preneur de son exploitation, serait l’objet, la cause, l’accessoire ou l’occasion».
La présente déclaration du preneur, et la renonciation qui l’accompagne, sont indissociables du consentement du bailleur aux présentes».
Le preneur a donc expressément renoncé à tour recours à l’encontre du bailleur, au titre, notamment, des loyers et charges dus.
Il est notable qu’à la date de la signature des deux baux, le 16 mai 2017, le preneur était déjà pleinement informé par les bailleurs, depuis l’envoi de trois courriers adressés les 10 octobre 2014, 26 novembre 2014 et 12 mars 2015 par lettre recommandée avec accusé de réception, du coût des travaux de rénovation et des modalités de facturation de ces travaux au titre des charges. Il convient donc de considérer que les charges issues des travaux de rénovation objet du présent litige ont été intégrées dans le périmètre des clauses de renonciation à agir.
Par voie de conséquence, l’Adeleco, agissant en sa qualité de représentante de la société Nature & Découvertes, est irrecevable à agir pour contester la refacturation des travaux de rénovation.
Sur la recevabilité de la demande formée pour le compte de la société Minelli
A l’appui de sa fin de non-recevoir, la société Rosny Beauséjour fait valoir :
– qu’aux termes d’un acte du 22 juin 2015 valant nouveau bail entre les parties, la société Minelli a renoncé à agir à son encontre au titre de la refacturation des travaux de rénovation ;
– que la société preneuse était informée de cette refacturation bien avant la conclusion de cet acte ;
– que ce contrat comporte bien des concessions réciproques ;
– que cette renonciation à agir ne porte pas atteinte au droit d’agir en justice ;
– que les dispositions de la loi “Pinel” du 18 juin 2014 ne s’appliquent pas au bail résilié car celui-ci a été conclu antérieurement à l’entrée en vigueur de cette loi.
L’Adeleco lui oppose :
– que la clause de renonciation à agir est sans portée ;
– que la transaction conclue avec le bailleur ne porte pas sur les charges ;
– que la société Minelli n’a pas pu renoncer à sa créance de trop-versé de charges sans aucune contrepartie ; que la clause invoquée par la bailleresse est contraire à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’Homme; qu’elle est de surcroît contraire à l’ordre public.
Le 22 juin 2015, la société Rosny Beauséjour et la société Minelli ont conclu un nouveau bail commercial se substituant au précédent contrat de location consenti le 7 juin 2006.
L’article du préambule intitulé «contexte dans lequel s’inscrit le présent bail» stipule ce qui suit : «Par ailleurs, il est précisé que le bailleur consent au présent bail de renouvellement compte tenu de la confirmation expresse par le preneur de l’absence, à ce jour, de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail du 7 juin 2006, notamment au titre des loyers et des charges calculés et facturés par le bailleur.
En conséquence, le preneur renonce à l’encontre du bailleur, de son mandataire et de l’organe à tous droits, demandes, actions et instances dont le bail du 7 juin 2006 notamment dans ses dispositions financières ou l’exercice par le preneur de son exploitation sur le centre, serait l’objet, la cause, l’accessoire ou l’occasion. La présente déclaration du preneur et la renonciation qui l’accompagne, sont indissociables du consentement du bailleur aux présentes.»
Ainsi, le bail comporte une renonciation du preneur à tout recours ou action à l’encontre du bailleur au titre de l’ancien bail, en ce qui concerne, notamment, les loyers et charges.
Pour les motifs exposés ci-dessus, il n’y a pas lieu, pour le tribunal, de se prononcer sur l’éventuelle illicéité de ces stipulations, dont l’annulation n’est pas sollicitée par l’Adeleco.
Il est notable qu’à la date de la signature du bail, le 22 juin 2015, le preneur était déjà pleinement informé par le bailleur, depuis l’envoi de deux courriers adressés les 10 octobre et 27 novembre 2014 par lettre recommandée avec accusé de réception, du coût des travaux de rénovation et des modalités de facturation de ces travaux au titre des charges. Il convient donc de considérer que les charges issues des travaux de rénovation objet du présent litige ont été intégrées dans le périmètre de la clause de renonciation à agir précitée.
Par voie de conséquence, l’Adeleco, agissant en sa qualité de représentante de la société Minelli, est irrecevable à agir pour contester la refacturation des travaux de rénovation.
Sur la recevabilité de la demande formée pour le compte de la société Micromania
A l’appui de sa fin de non-recevoir, la société Rosny Beauséjour fait valoir :
– qu’aux termes d’un nouveau bail conclu le 31 mars 2015, le preneur a renoncé à formuler une quelconque contestation à son encontre au titre des charges ;
– que la société Micromania était informée de cette refacturation bien avant la conclusion de ce contrat.
L’Adeleco lui oppose :
– que la clause de renonciation à agir est sans portée ;
– que la transaction conclue avec le bailleur ne porte pas sur les charges ;
– que la société Micromania n’a pas pu renoncer sans contrepartie à sa créance de trop-versé de charges ; que la clause invoquée par la bailleresse est contraire à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’Homme; que de surcroît, elle est contraire à l’ordre public.
Le 31 mars 2015, la société Rosny Beauséjour et la société Micromania ont conclu un nouveau bail commercial se substituant au précédent contrat de location consenti le 6 novembre 2006.
L’article du préambule intitulé «contexte dans lequel s’inscrit le présent bail» stipule ce qui suit : «le bail intervient en renouvellement du bail consenti le 6 novembre 2006 modifié par avenant du 12 avril 207 dont la durée de 10 ans expirait le 31 décembre 2014. Par exploit d’huissier en date du 5 juin 2014, la société Rosny Beauséjour a fait délivrer un congé avec offre de renouvellement à compter du 1er janvier 2015. C’est en cet état que les parties se sont rapprochées et sont convenues de renouveler amiablement le bail du 6 novembre 2006 à compter du 1er janvier 2014, déclarant en conséquence, renoncer expressément et irrévocablement aux effets des congés si bien que le bail du 6 novembre 2006 est réputé s’être poursuivi par tacite prorogation jusqu’au présent bail de renouvellement étant précisé que les présentes constituent une transaction au sens des articles 2044 et suivants du Code civil qui emporte désistement d’instance et d’action et que chacun des parties conservant à sa charge les frais, dépens et honoraires par elles exposés dans le cadre de la procédure susvisée. Par ailleurs, il est précisé que le bailleur consent au présent bail de renouvellement compte tenu de la confirmation expresse par le preneur de l’absence, à ce jour, de tout motif de réclamation à son encontre au titre du bail du 6 novembre 2006, notamment au titre des loyers et des charges calculés et facturés par le bailleur. En conséquence le preneur renonce à l’encontre du bailleur de son mandataire et de l’organe à tous droits, demandes, actions et instances dont le bail du 6 novembre 2006 notamment dans ses dispositions financières et/ou l’exercice par le preneur de son exploitation sur le centre, serait l’objet, la cause, l’accessoire ou l’occasion».
Ainsi, le bail comporte une renonciation du preneur à tout recours ou action à l’encontre du bailleur au titre de l’ancien bail, en ce qui concerne, notamment, les loyers et charges.
Pour les motifs exposés ci-dessus, il n’y a pas lieu, pour le tribunal, de se prononcer sur l’éventuelle illicéité de ces stipulations dont l’annulation n’est pas sollicitée par l’Adeleco.
Il est notable qu’à la date de la signature du bail, le 31 mars 2015, le preneur était déjà pleinement informé par le bailleur, depuis l’envoi de trois courriers adressés les 10 octobre, 27 novembre et 11 décembre 2014 par lettre recommandée avec accusé de réception, du coût des travaux de rénovation et des modalités de facturation de ces travaux au titre des charges. Il convient donc de considérer que les charges issues des travaux de rénovation objet du présent litige ont été intégrées dans le périmètre de la clause de renonciation à agir précitée.
Par voie de conséquence, l’Adeleco, agissant en sa qualité de représentante de la société Micromania, est irrecevable à agir pour contester la refacturation des travaux de rénovation.
Sur la demande de remboursement des charges facturées au titre des travaux de rénovation du centre commercial
L’Adeleco sollicite le remboursement des charges facturées par les bailleurs et payées par ses mandants au titre des travaux de rénovation du centre commercial, qu’elle estime indues. Elle s’oppose également au paiement de ces travaux par les sociétés preneuses qui n’ont pas déjà honoré les factures émises à ce titre par les bailleurs. Au soutien de sa demande, elle fait valoir :
– que les clauses contractuelles relatives aux charges récupérables sont inefficaces car elles sont énoncées « à titre énonciatif et non limitatif», avec l’utilisation de l’adverbe «notamment» qui est inefficace et ne peut suppléer l’absence de clause expresse visant des charges particulières ;
– que l’opération d’envergure de revalorisation patrimoniale menée par propriétaires du centre commercial constitue une opération globale dont le coût n’est pas récupérable sur les preneurs car une telle opération n’est pas prévue au bail, qui ne vise pas les «restructurations», les «suppressions», les «modifications» ou les «constructions» réalisées ;
– que la clause de rénovation ou décoratif ne s’applique pas à l’opération litigieuse, qui est d’ampleur ;
– que pour les baux comprenant une clause faisant référence à ces travaux, cette dernière n’est pas intégrée dans la partie “charges” du contrat, ne résulte pas d’une clause expresse et ne fait état que d’une renonciation à agir et non d’une contestation d’un transfert de charges que les parties n’ont jamais eu l’intention de mettre à la charge des preneurs ; que l’absence de cette clause dans les autres baux démontre que les travaux entrepris n’ont pas à être à la charge des preneurs ;
– que les bailleurs ne démontrent pas que les travaux étaient nécessaires, ainsi que le prévoient les contrats ;
– que la preuve de la nécessité de maintenir le centre commercial à un niveau concurrentiel attractif n’est pas non plus rapportée ;
– que les sociétés preneuses prennent d’ores et déjà en charge des travaux importants chaque année ; qu’une opération d’une telle importance dépasse le cadre «annuel» prévu contractuellement ;
– que la clause relative aux charges vise «les travaux concernant les parties communes ou à usage collectif» ; que l’opération litigieuse ne distingue pas les parties communes et les parties privatives ; qu’il apparaît que l’opération a porté également sur les vitrines des boutiques, parties privatives ;
– que les bailleresses ne justifient pas des tantièmes de copropriété ;
– que les chiffres allégués par les bailleurs ne sont pas justifiés.
Les sociétés bailleresses s’opposent à la demande de remboursement des charges afférentes aux travaux litigieux. Elles font valoir en substance que :
– les travaux refacturés doivent être appréciés poste par poste, et non de manière globale, pour vérifier s’ils relèvent de l’une ou de l’autre des catégories de charges effectivement imputables au preneur ;
– que si une qualification globale des travaux de rénovation devait être retenue, il conviendrait de constater qu’ils relèvent d’une opération de rénovation du centre commercial et n’impliquent aucune restructuration, la notion de “restructuration” impliquant la création de surfaces nouvelles, la modification de façades et encore le réaménagement entre des parties communes et des surfaces privatives, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;
– que les clauses des baux sont claires et précises et permettent de procéder à la refacturation contestée, de sorte qu’il n’y a pas lieu de les interpréter, sous peine de dénaturation ;
– que les travaux de rénovation étaient nécessaires pour maintenir la commercialité du centre commercial ; qu’ils ont de surcroît été bénéfiques pour les commerçants puisqu’ils ont permis d’augmenter la fréquentation et le chiffre d’affaires réalisé dans le centre commercial ;
– que le rapport de l’expert, madame Flore Deruelle Lassale, mentionne à de nombreuses reprises la nécessité de réaliser ces travaux de rénovation ;
– que le fait que les baux prévoient l’établissement d’un budget prévisionnel annuel ainsi que le paiement de provisions trimestrielles au titre des charges ne saurait être de nature à priver les bailleurs de leur droit de refacturer des charges non intégrées dans ledit budget prévisionnel dès lors qu’elles sont effectivement refacturables ;
– que la refacturation est effectuée sur la base des tantièmes des locaux pris à bail résultant du règlement de copropriété et de l’état descriptif de division établi par un géomètre expert, voté en assemblée générale et publié ;
– que le montant des travaux est justifié ;
– que les articles R. 145-36 et R. 145-37 du Code de commerce issus de la loi dite “Pinel” sont inapplicables s’agissant de baux conclus antérieurement à l’entrée en vigueur de cette loi.
L’article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
L’article 1315 ancien du même code dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
En l’espèce, les baux litigieux, compte tenu de la date de leur conclusion, ne sont pas soumis aux dispositions de la loi du 18 juin 2014 dite “loi Pinel”. La répartition des charges entre le bailleur et le preneur a donc été librement opérée par les stipulations du contrat, dont l’interprétation doit être stricte
Les baux comportent la stipulation suivante rédigée en des termes semblables, hormis quelques différences de formulation sans incidence sur la liste des charges mises à la charge du preneur : «le présent bail est considéré comme net de toutes charges pour le bailleur».
Plus particulièrement il est stipulé «qu’à titre énonciatif et non limitatif, les charges des parties communes ou à usage collectif seront remboursées par le preneur au bailleur, et comprendront notamment :
a) Les frais d’éclairage, d’eau, de chauffage, de ventilation (climatisation, réfrigération, …), de nettoyage, d’enlèvements des déchets, de voirie et de déneigement.
b) Les travaux concernant les parties communes ou à usage collectif et résultant :
1° soit d’entretien, de ravalement, de réparations grosses ou menues sans aucune distinction y compris les réparations prévues par l’article 606 du Code civil,
2° soit de remplacement, de réfection, de création, d’améliorations ou de rénovations de l’Ensemble Immobilier et/ou du Centre,
3° soit d’entretien, de remplacement, de réfection, de renouvellement des équipements et installations techniques de l’Ensemble Immobilier et/ou du Centre qui s’avéreraient nécessaires, et ce même si les travaux vises aux 1°, 2° et 3° ci-dessus :
– sont occasionnés par la vétusté, par dérogation à l’article 1755 du Code civil, par l’évolution des techniques ou par l’obsolescence des matériaux et équipements,
– sont justifiés par la réglementation administrative en vigueur ou à venir, ou encore par l’intérêt général du centre commercial,
– résultent d’une injonction administrative ou municipale, ainsi que les frais et honoraires générés par la réalisation des travaux ci-dessus y compris les honoraires et frais d’étude et de maître d’ouvrage délégué, en ce inclus les frais d’études préalables à la réalisation des travaux. L’attention du Preneur est tout particulièrement attirée sur le fait que l’intérêt général du centre commercial, son évolution, l’obsolescence et/ou la vétusté des ouvrages et équipements du centre commercial peuvent générer des travaux de rénovation ou décoratifs nécessaires au maintien du centre commercial à un niveau concurrentiel attractif pour la clientèle, l’ensemble des coûts en résultant étant refacturé au preneur.
c) Les rémunérations et charges sociales du personnel administratif et technique et/ou les montants factures par des entreprises extérieures, chargées notamment de la circulation, de la sécurité, du gardiennage, du nettoyage, de l’entretien, etc., le cout de leur uniforme et de leur équipement.
d) Le coût d’acquisition de l’outillage, des appareils d’élévation mécanique et de tout autre matériel d’entretien, de l’agencement et du mobilier, de la signalisation horizontale ou verticale quels que soient les systèmes installés, de tout matériel d’information de la clientèle installé dans le centre ou à l’extérieur, de tous les systèmes de contrôle, de surveillance ou de comptage et de tous autres éléments nécessaires à la sécurité et à l’intérêt général de l’ensemble immobilier et/ou du centre, etc. – le coût de leur entretien, de leur réparation, de leur modification ou de leur remplacement.
e) La décoration d’ambiance et éventuellement les fleurs et les plantes ainsi que les frais de jardinage des espaces verts.
f) Toutes les primes d’assurances contractées par l’organe désigné par le bailleur ou les propriétaires de l’Ensemble Immobilier et/ou du centre commercial pour gérer ledit Ensemble ou le Centre, pour assurer le centre, et tous les biens meubles ou immeubles le constituant et notamment, sans que cette énumération soit limitative :
– les assurances incendie et explosion – vandalisme et bris de glaces – responsabilité civile, dégâts des eaux, déclenchement accidentel et fuites de l’installation des extincteurs automatiques, etc.,
– les honoraires de courtage d’assurance,
g) Les impôts et taxes en ce compris les frais divers y attachés, étant expressément convenu que le preneur devra rembourser au bailleur ou à son mandataire sa quote-part des impôts et taxes de toute nature ainsi que toutes nouvelles contributions, taxes, augmentations d’impôts légalement mises à la charge des bailleurs, et, à titre d’exemple, sans que cette liste soit limitative, l’impôt foncier et la taxe sur les bureaux, les commerces et les entrepôts qui seront appelés séparément et soumis à Tva.
h) La rémunération de l’organe désigné par le bailleur ou les propriétaires de l’Ensemble Immobilier et/ou du centre commercial pour gérer ledit Ensemble ou le Centre, visé au paragraphe 2 de l’EXPOSE préalable.
i) Les salaires et charges sociales du personnel affecté à la gestion du centre commercial.
j) Le coût éventuel résultant d’une redevance pour utilisation du parking.»
Pour les baux conclus avec les sociétés Naf Naf et Maison 123, l’article 6.1 de l’annexe 1 stipule ce qui suit : «Par dérogation aux dispositions du 2° du paragraphe b) de l’article 6.1.2 du bail, les travaux de création ne concerneront pas les travaux d’extension éventuelle de l’Ensemble Immobilier et/ou du centre commercial, lesquels seront réalisés par le bailleur sans qu’il puisse réclamer au preneur une quote-part de remboursement. En conséquence les travaux de création qui seront refacturés au preneur dans le cadre de cet article et ce, pour sa quote-part, s’entendent des créations à réaliser dans les parties communes ou à usage collectif de l’Ensemble Immobilier et/ou du centre :
– qu’elles soient existantes au bail,
– ou qu’elles soient créées ultérieurement par le bailleur à la suite de l’extension de l’Ensemble Immobilier et/ou du centre, réalisée par le bailleur dans le cadre des dispositions ci-dessus. Cette dérogation ne remet pas en cause le principe selon lequel l’assiette et la répartition des charges sera étendue à l’ensemble des parties communes et du Centre, en ce inclus, celles issues d’une extension de ce dernier.»
Par ailleurs, l’article des baux relatif aux modalités de répartition des charges entre les différents occupants du centre commercial stipule que : «conformément au Règlement de Copropriété et ses modificatifs intervenus ou futurs dont le preneur déclare connaître les dispositions actuelles, l’ensemble des charges du centre sera réparti entre ses différents exploitants au prorata des millièmes des parties communes attachés à chaque lot de copropriété. Dans le cas où les lieux loués ne correspondraient pas à l’intégralité d’un lot de copropriété, la répartition serait effectuée proportionnellement à leur surface par rapport à celle du lot de copropriété en question.»
Enfin, les contrats prévoient ce qui suit en ce qui concerne les modalités de paiement des quotes-parts de charges : «Le bailleur (…) établira un budget prévisionnel annuel comprenant toutes les charges à répartir entre les exploitants. Le preneur devra verser, par prélèvements bancaires, à compter de la date de prise d’effet du bail, dès réception de la facture puis le 1er jour de chaque trimestre civil et d’avance, sa quote-part de provision pour charges, impôts et taxes, correspondant au quart de ces budgets annuels et le solde de la régularisation annuelle dans les dix jours de l’appel de fonds.
Les acomptes trimestriels de charges seront appelés sur la base des budgets prévisionnels établis en début et en cours d’année et les comptes seront arrêtés une fois l’an et répartis entre les exploitants du centre en faisant apparaître les montants hors taxes et la Tva que le preneur pourra récupérer, après paiement intégral des sommes appelées.
En conséquence, le preneur s’engage à régler au bailleur, à première demande de celui-ci, la totalité des quotes-parts lui incombant dans les conditions définies ci-dessus, ainsi que la régularisation annuelle qui résultera des arrêtés de compte. Si la régularisation annuelle fait apparaître un solde en faveur du preneur, il sera imputé sur l’acompte trimestriel suivant. (…)
Cet article constitue, dans son intégralité, une condition déterminante du présent bail sans laquelle le bailleur n’aurait pas contracté, ce qui est expressément accepté par le preneur.»
Pour déterminer le bien-fondé de la répartition des charges opérée par les bailleurs, il convient d’examiner précisément la nature des travaux en cause pour vérifier s’ils relèvent des charges contractuellement imputables aux preneurs.
Les travaux litigieux ont été votés dans les termes suivants lors de l’assemblée générale des copropriétaires du centre commercial tenue le 27 septembre 2013 :
«- remplacement intégral ou partiel du revêtement de sol des parties communes
– remplacement des garde-corps métalliques et sérigraphiés des parties communes intérieures
– réfection et remplacement des faux-plafonds des parties communes intérieures
– rénovation des sanitaires hommes et femmes
– reprise des menuiseries des RIA et des portes issues de secours
– traitement des poteaux intérieurs
– remplacement de l’un des deux escaliers centraux
– installation d’un ascenseur panoramique
– installation d’escalators sur la place Carrefour
– plantations végétales intérieures
– implantation de nouveaux modules d’espaces repos, d’un nouveau kiosque accueil et d’un nouvel espace enfants
– traitement de l’habillage extérieur des travelators
– mise en place d’une nouvelle signalétique
– reprise complète de l’éclairage des parties communes intérieures
– adaptation des équipements techniques, notamment réseau sprinkler et réseau RIA
– réfection de la fontaine de la place centrale et mise en place de gestes-architecturaux
– installations de chantier
NB : le programme de rénovation mené par le syndicat des copropriétaires n’inclut pas les parties privatives du centre, et notamment les façades des différents preneurs. En revanche, un cahier des charges sera réalisé dans le but de traiter les façades des preneurs des différents copropriétaires.»
Les travaux susvisés ne peuvent être considérés comme une opération globale et indivisible de restructuration, ainsi que le soutient l’Adeleco, sauf à méconnaître les termes de la résolution adoptée par les copropriétaires, qui distinguent précisément différents postes de travaux.
L’existence d’une pluralité de postes de travaux distincts résulte également de l’analyse du programme de travaux que madame Deruelle Lassale, experte immobilière, a effectuée à la demande des copropriétaires. Son rapport, remis le 12 novembre 2014, comporte un descriptif de chacun des lots de travaux, le coût associé, ainsi qu’un classement de chaque poste selon des types (par exemple : serrurerie, structure, génie climatique) et des motifs (par exemple : amélioration/intérêt général). L’Adeleco conteste la valeur probante de ce rapport, qui constitue toutefois un élément de preuve recevable soumis à la discussion des parties et corroboré par d’autres pièces versées aux débats, telles que, notamment, le procès-verbal de l’assemblée générale précitée, le contrat de maîtrise d’œuvre et de maîtrise d’ouvrage et les différents documents explicatifs sur la nature et le déroulement des travaux.
Il résulte de ce qui précède que les travaux de rénovation litigieux peuvent et doivent s’analyser poste par poste, et non de façon globale.
Or, chacun des postes de travaux, tels qu’ils résultent du procès-verbal de l’assemblée générale des copropriétaires, des contrats de maîtrise et du rapport de Madame Deruelle Lassale, correspond à des charges contractuellement imputables aux preneurs.
En effet, les baux précités stipulent que les travaux d’entretien, de remplacement, de réfection, de création, d’amélioration, de rénovation, de renouvellement des équipements et installations techniques justifiés par l’intérêt général du centre commercial, ainsi que les frais et honoraires générés par la réalisation des travaux ci-dessus y compris les honoraires et frais d’étude et de maître d’ouvrage délégué, en ce inclus les frais d’études préalables à la réalisation des travaux, sont à la charge du preneur. Les contrats stipulent également que l’ensemble des coût résultant de travaux de rénovation est refacturé au preneur.
S’il est exact, comme le relève l’Adeleco, que la clause relative aux charges imputables au preneur comporte une énumération “non limitative” et “à titre énonciatif”, force est de constater que ce constat est sans incidence en l’occurrence puisque les travaux de rénovation du centre commercial qui ont été refacturés aux preneurs sont prévus au contrat de bail. Ainsi, l’Adeleco est mal fondée à soutenir que les travaux litigieux constitueraient des travaux de restructuration excédant le cadre du bail.
Par ailleurs, les stipulations contractuelles n’imposent pas aux bailleurs d’adresser aux preneurs une copie de l’ensemble des documents relatifs aux travaux entrepris. Au demeurant, il apparaît qu’à la suite du vote de la résolution précitée, les preneurs du centre commercial ont été informés de la réalisation des travaux de rénovation des parties communes par une lettre d’information, par une réunion de présentation ainsi que par la diffusion d’une brochure détaillant le programme des travaux. Par ailleurs, les bailleurs justifient avoir mis à disposition des preneurs l’ensemble des documents budgétaires et techniques relatifs aux travaux votés par les copropriétaires du centre.
Le fait que les baux prévoient l’établissement d’un budget prévisionnel annuel ainsi que le paiement de provisions trimestrielles de charges n’est pas de nature à priver les bailleurs de leur droit de refacturer les charges qui n’auraient pas été intégrées dans ledit budget, dès lors, naturellement, qu’elles sont contractuellement à la charge des preneurs, comme cela est le cas en l’espèce, et qu’elles sont justifiées.
En ce qui concerne la nécessité des travaux, celle-ci résulte de la volonté légitime des bailleurs de maintenir le centre commercial à un niveau attractif pour la clientèle dans un contexte marqué par une forte concurrence régionale, et de permettre ainsi aux commerçants de réaliser un chiffre d’affaires plus conséquent. Il n’est pas contesté à cet égard que le centre commercial n’avait pas été rénové depuis près de 20 ans et que d’autres copropriétaires au sein du centre commercial ont également voté en faveur de la réalisation de ces travaux. La nécessité des travaux ayant donné lieu aux appels de charges litigieux est donc justifiée.
Par ailleurs, le choix des copropriétaires de procéder à des travaux de grande ampleur, mais peu fréquents, peut se justifier par la volonté de réduire l’impact défavorable des travaux sur la fréquentation du centre et sur l’activité des commerces pendant la réalisation des travaux.
En ce qui concerne l’affirmation de l’Adeleco selon laquelle les travaux auraient également porté sur des parties privatives, il est exact que la brochure de présentation des travaux de rénovation du centre commercial fait référence aux dessus des vitrines. Toutefois, ce document, qui n’a aucune valeur contractuelle, ne correspond pas aux termes de la résolution de l’assemblée générale des copropriétaires adoptée le 27 septembre 2013. Il est d’ailleurs notable que le rapport de Madame Deruelle Lassale ne fait aucunement référence à des travaux sur des vitrines.
Au vu de ces éléments, il n’est pas établi que les travaux entrepris auraient porté sur les parties privatives du centre.
Par ailleurs, l’Adeleco ne démontre pas en quoi la clause de «rénovation ou décoratif» ne s’appliquerait pas à l’opération litigieuse, de sorte que ce moyen est inopérant.
De même, il ne peut être tiré aucune conséquence du fait que les baux conclus avec certains preneurs évoquent, dans le cadre de clauses de renonciation à recours, les travaux réalisés par le bailleur. En effet, l’objet de ces stipulations est d’exclure toute action des preneurs contre le bailleur du chef de ces travaux, et non de déterminer la répartition entre eux de la charge financière résultant desdits travaux, la clause relative aux charges étant suffisante à ce titre.
Enfin, les preneurs ne rapportent pas la preuve du caractère somptuaire des travaux litigieux. Le seul fait que le montant des dépenses exposées à cette occasion soit élevé est insuffisant à entraîner cette qualification dès lors que le coût de l’opération se justifie par le nombre de postes de travaux et l’importance de la surface rénovée.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il convient de dire que les travaux de rénovation du centre commercial mis à la charge des preneurs relèvent bien des charges qui leur sont imputables en vertu du bail, qui fait la loi des parties.
En ce qui concerne le quantum des sommes refacturables aux sociétés preneuses, les sociétés bailleresses justifient avoir honoré l’ensemble des appels de fonds résultant du vote de la résolution approuvant la réalisation des travaux. Ces appels étaient basés sur les coûts figurant dans les trois contrats conclus au titre de la maîtrise d’ouvrage avant le démarrage des travaux, à savoir :
– le contrat de maîtrise d’ouvrage signé le 21 octobre 2011 lors de la phase de faisabilité, voté lors de l’assemblée générale du 17 octobre 2011, pour la somme de 190.000 €,
– l’avenant n° 1 signé le 27 septembre 2013 lors de la phase de suivi des études et d’analyse des offres, voté lors de l’assemblée générale du 27 septembre 2013, qui inclut les 190.000 € pour la somme de 1.880.000 €,
– l’avenant n° 2 du 11 juillet 2014 voté lors de l’assemblée générale du 11 juillet 2014 pour le suivi et la réalisation du projet de rénovation, pour la somme de 18.120.000 €.
Il est notable que les sociétés bailleresses ne produisent aucun document justifiant du coût final des travaux alors qu’il est constant que ceux-ci, débutés en 2014, sont désormais réputés achevés.
Le montant total des travaux de 19.840.131 € inscrit sur le tableau récapitulatif établi par les sociétés bailleresses pour chaque preneur n’est corroboré par aucune autre pièce. L’experte sollicitée en amont des travaux par les bailleurs précise elle-même dans son rapport que sa proposition de répartition du coût des travaux s’appuie sur les documents produits en phase projet et «qu’il convient d’établir une nouvelle répartition en phase exécution du marché».
Par ailleurs, si les bailleurs produisent les 11 appels de charges travaux, force est de constater qu’ils ne justifient d’aucune régularisation alors que les stipulations précitées des baux prévoient expressément la réalisation d’un arrêté des comptes devant donner lieu à une régularisation annuelle.
En outre, les tableaux récapitulatifs adressés à chaque preneur omettent de mentionner les tantièmes applicables au preneur considéré, ainsi que le nombre de tantièmes généraux appliqué pour calculer la refacturation. Si les bailleurs allèguent dans leurs conclusions avoir appliqué les tantièmes de charges générales de 102.938, aucune formule de calcul ne permet de retrouver ce chiffre. Les tableaux produits pour les besoins de la cause, qui reprennent pour chaque preneur le montant refacturé associé aux tantièmes loués, ne permettent pas non plus de retrouver, soit le coût total des travaux, soit les tantièmes appliqués pour procéder au calcul de refacturation.
Enfin, alors que par courriers du 10 octobre 2014, les sociétés preneuses se voyaient notifier le montant final des travaux fixé par les sociétés bailleresses, un nouveau montant leur a finalement été notifié entre le 26 et le 27 novembre 2014, sans explication sur les modalités de calcul et sans les documents permettant d’établir le coût final des travaux, ce nouveau chiffrage étant justifié par l’établissement d’un «rapport technique de l’expert (…) maintenant définitif», non communiqué aux sociétés preneuses.
Il résulte de ce qui précède que les sociétés bailleresses, sur lesquelles pèse la charge de la preuve de la créance alléguée conformément au principe posé par l’article 1315 alinéa 1er ancien du Code civil, échouent à justifier, d’une part, du coût réel des travaux, d’autre part, du bien-fondé des modalités de refacturation qu’elles ont mises en œuvre.
Par voie de conséquence, il convient de dire que les provisions versées par les preneurs au titre des travaux de rénovation du centre commercial sont dépourvues de cause. Les bailleurs seront donc condamnés à leur rembourser les sommes versées selon les modalités suivantes :
Sommes dues par la société Imfra au profit de l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés suivantes :
– Chaussures Eram pour la somme de 75.778,30 € TTC,
– Heyraud pour la somme de 45.325,33 € TTC,
– Naf Naf pour la somme de 60.197,61 € TTC,
– Magellan pour la somme de 45.089,29 € TTC,
– Texto pour la somme de 37.535,06 € TTC,
– Etam Lingerie pour la somme de 5.795,03 € TTC,
– Undiz pour la somme de 3.797,78 € TTC,
– Maison 123 pour la somme de 5.665,67 € TTC,
– Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam prêt-à-Porter pour la somme de 3.270,05 € TTC,
Soit la somme totale de 282.454,12 € TTC,
Sommes dues par la société Rosny Beauséjour au profit de l’Adelaco ès-qualités de mandataire des sociétés suivantes :
– Damart pour la somme de 93.147,16 € TTC,
– Devred pour la somme de 38.092,53 € TTC,
– Cafan pour la somme de 54.170,53 € TTC,
– Caroll pour la somme de 47.491,95 € TTC,
– Elexia (sous l’enseigne Franck Provost) pour la somme de 41.308,09 € TTC,
– Elexia (sous l’enseigne Jean louis David) pour la somme de 31.908,62 € TTC,
– La Poste pour la somme de 23.671,27 € TTC,
– San Marina pour la somme de 46.502,53 € TTC,
– Etam Lingerie pour la somme de 2.373,47 € TTC,
– Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam prêt-à-Porter pour la somme de 4.206,14 € TTC,
Soit la somme totale de 382.872,29 € TTC,
Somme due par la société Uni-Commerces au profit de l’Adeleco, es qualité de mandataire de la société Flunch : 362 587,91 € TTC.
Sur les demandes accessoires
La capitalisation des intérêts a été sollicitée par les seules sociétés défenderesses dans le cadre de leurs demande de condamnation des sociétés Maison 123, Etam Lingerie et Undiz au paiement d’un arriéré de charges locatives. Cette prétention ayant été déclarée irrecevable pour les motifs exposés ci-dessus, la demande de capitalisation des intérêts est sans objet.
L’exécution provisoire n’apparaît pas justifiée en l’espèce et ne sera donc pas ordonnée.
Les sociétés défenderesses, qui perdent le procès, supporteront in solidum la charges des dépens, dont distraction conformément à l’article 699 du Code de procédure civile pour ceux des dépens avancés par Maître Jehan-Denis Barbier pour le compte de l’Adeleco.
La société Rosny Beauséjour sera de surcroît condamnée à payer à l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés Damart, Devred, Cafan, Caroll, Elexia (exerçant sous l’enseigne Franck Provost), Elexia (exerçant sous l’enseigne Jean Louis David), La Poste, San Marina, Etam Lingerie, Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam prêt-à-Porter, la somme de 5.000 € par société mandante, soit la somme totale de 50.000 €, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société Imfra sera pour sa part condamnée à payer à l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés Chaussures eram, Heyraud, Naf Naf, Magellan, Texto, Etam Lingerie, Undiz, Maison 123, Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam prêt-à-Porter, la somme de 5.000 € par société mandante, soit la somme totale de 45.000 €, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société Uni-Commerces sera condamnée à payer à l’Adeleco ès-qualités de mandataire de la société Flunch, la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs
Le tribunal, statuant en audience publique par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
– Reçoit l’intervention volontaire des sociétés Du Pareil au Même, Micromania, Etam Lingerie, Maison 123, Flunch, Heyraud, Texto France, Etam prêt-à-Porter, Ex and Holding (précédemment dénommée André), Elexia (enseigne Jean Louis David), Minelli, Nation Chaussures, Undiz représentées par leur mandataire, l’Adeleco ;
– Déclare parfait le désistement d’instance et d’action des sociétés Delta Lingerie, Ludendo, Pimkie, Du Pareil au Même, Camaïeu, Old Wild West, Quick et Ronip, représentées par leur mandataire, l’Adeleco ;
– Déclare irrecevables les demandes des sociétés Imfra et Rosny Beauséjour formées par voie d’assignations en intervention forcée délivrées le 23 septembre 2019 à l’encontre des sociétés Maison 123, Etam Lingerie et Undiz ;
– Déclare l’Adeleco irrecevable à agir ès-qualités de mandataire des sociétés Boulangeries Paul, Nation chaussures, Ex and Holding, Minelli, Micromania et Nature & Découvertes ;
– Déclare recevables les demandes formées par l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés Naf Naf, Maison 123, Devred, Caroll, Elexia (Franck Provost), La Poste, Damart, Chaussures Eram, Etam Lingerie, Micromania et Undiz ;
– Condamne la société Imfra à verser la somme de 282.454,12 € TTC à l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés suivantes, ladite somme étant répartie comme suit :
– Chaussures Eram pour la somme de 75.778,30 € TTC,
– Heyraud pour la somme de 45.325,33 € TTC,
– Naf Naf pour la somme de 60.197,61 € TTC,
– Magellan pour la somme de 45.089,29 € TTC,
– Texto pour la somme de 37.535,06 € TTC,
– Etam Lingerie pour la somme de 5.795,03 € TTC,
– Undiz pour la somme de 3.797,78 € TTC,
– Maison 123 pour la somme de 5.665,67 € TTC,
– Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter pour la somme de 3.270,05 € TTC ;
Condamne la société Rosny Beauséjour à verser la somme de 382.872,29 € TTC à l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés suivantes, ladite somme étant répartie comme suit :
– Damart pour la somme de 93.147,16 € TTC,
– Devred pour la somme de 38.092,53 € TTC,
– Cafan pour la somme de 54.170,53 € TTC,
– Caroll pour la somme de 47.491,95 € TTC,
– Elexia (sous l’enseigne Franck Provost) pour la somme de 41.308,09 € TTC,
– Elexia (sous l’enseigne Jean Louis David) pour la somme de 31.908,62 € TTC,
– La Poste pour la somme de 23.671,27 € TTC,
– San Marina pour la somme de 46.502,53 € TTC,
– Etam Lingerie pour la somme de 2.373,47 € TTC,
– Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter pour la somme de 4.206,14 € TTC ;
– Condamne la société Uni-Commerces à verser la somme de 362.587,91 € TTC à l’Adeleco ès-qualités de mandataire de la société Flunch ;
– Condamne la société Rosny Beauséjour à payer à l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés Damart, Devred, Cafan, Caroll, Elexia (exerçant sous l’enseigne Franck Provost), Elexia (exerçant sous l’enseigne Jean Louis David), La Poste, San Marina, Etam Lingerie, Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter, la somme de 5.000 € par société mandante, soit la somme totale de 50.000 €, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamne la société Imfra à payer à l’Adeleco ès-qualités de mandataire des sociétés Chaussures Eram, Heyraud, Naf Naf, Magellan, Texto, Etam Lingerie, Undiz, Maison 123, Etam Lingerie venant aux droits de la société Etam Prêt-à-Porter, la somme de 5.000 € par société mandante, soit la somme totale de 45.000 €, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamne la société Uni-Commerces à payer à l’Adeleco ès-qualités de mandataire de la société Flunch, la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Déboute l’Adeleco du surplus de ses demandes ;
– Condamne in solidum les sociétés Imfra, Rosny Beauséjour et Uni-Commerces aux dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Jehan-Denis Barbier conformément à l’article 699 du Code de procédure civile pour ceux des dépens avancés pour le compte de l’Adeleco.
