C’est une vieille histoire… L’indexation permet une variation du loyer à la hausse, c’est son rôle. Mais elle doit aussi pouvoir le faire varier à la baisse, ce que certains contrats oublient trop souvent. Ce défaut pourrait bien ne plus être un croque-mitaine. Un récent arrêt de Cassation semble ouvrir la voie à un règlement plus simple des conflits nés de cette lacune, en se bornant à déclarer non écrite cette partie prohibée de la clause, laissant tout le reste en l’état. Une façon de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain… et de couper court aux excès de contentieux !
Par Me Hanan Chaoui, docteur en droit, spécialiste en droit immobilier, avocate-associée (Cabinet Adaltys)
L’arrêt n° 19-23038 rendu par la Cour de cassation le 30 juin 2021 constitue une nouvelle étape dans le contentieux des clauses d’indexation et leur légalité.
Le contentieux initial,relatif au mécanisme de «rattrapage»
Pour rappel, le contentieux des clauses d’indexation a connu un développement important entre 2011 et 2013, à la faveur de certaines décisions qui avaient censuré les clauses d’indexation, au motif qu’elles comportaient un indice de base fixe et/ou qu’il existait un «rattrapage» en raison d’une distorsion entre la période d’indexation et la période de variation des indices. Compte tenu des conséquences attachées à l’illicéité d’une clause d’indexation (remboursement des trop-perçus de loyer découlant de la clause d’indexation, dans la limite de la prescription quinquennale et suppression de la clause d’indexation, pour l’avenir), l’intérêt d’une telle procédure était évident.
Néanmoins, la Cour de cassation a, progressivement, abouti à une position consistant à considérer que même en présence de «rattrapage», seule la première indexation est illicite, sans remettre en cause la validité de la clause d’indexation (Cass. 3e civ., 29 nov. 2018, n° 17-23.058). En tout état de cause, cette position de la Cour a, de fait, vidé de sa substance l’intérêt d’une procédure en cas de «rattrapage».
Le contentieux résiduel, relatif aux clauses d’indexation variant uniquement à la hausse
L’arrêt du 30 juin 2021 commenté ici (n° 19-23038) s’inscrit dans le cadre du contentieux relatif aux clauses d’indexation variant uniquement à la hausse. La clause censurée comportait une interdiction de variation à la baisse, et un plafonnement de l’indexation, en cas de hausse, à hauteur de 3 %. En l’espèce, la cour d’appel de Reims a censuré la clause d’indexation dans son ensemble, au motif :
– qu’elle ne varie qu’à la hausse ;
– que l’interdiction de variation à la baisse était indivisible du reste de la clause d’indexation.
Sur un plan strictement juridique, la cour appliquait la position de la Cour de cassation, telle que dégagée dans son arrêt du 14 janvier 2016 (n° 14-24.681). Sans rentrer dans les détails, le raisonnement de la cour d’appel était toutefois critiquable dans la mesure où il était possible de considérer que la stipulation interdisant la variation à la baisse était divisible et aurait dès lors pu être censurée, sans remettre en cause l’ensemble de la clause d’indexation. Mais l’arrêt de Reims n’a pas été censuré pour dénaturation d’une clause claire.
En effet, la Cour de cassation a considéré que la cour d’appel «n’a pas donné de base légale à sa décision» et ajoute, pour la première fois à notre connaissance : «[…] que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite». La Cassation semble ainsi avoir infléchi sa position pour considérer que seule la stipulation prohibée doit être censurée, et non l’ensemble de la clause. En conséquence, l’intérêt d’une procédure en présence d’une clause variant uniquement à la hausse disparaît, puisque la clause d’indexation reste applicable pour l’avenir, sans la stipulation illicite…
La fin du contentieux lié aux clauses d’indexation semble désormais proche !
> Lire l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 30 juin 2021
